Elton Mokolo : « Le journalisme de sport reste quelque chose de complexe »

Après avoir étudié à l’Institut Européen du Journalisme (IEJ), le journaliste Elton Mokolo se retrouve aujourd’hui à parler de football sur Internet, et notamment sur youtube. Du tirage au sort des huitièmes de finale de la Ligue des Champions, jusqu’à la démocratisation du football, ses qualités d’expertise n’ont cessé d’argumenter des propos captivants.

[ Article paru le 23/12/2021 sur l’ancien blog ]

Elton Mokolo sur le plateau du Winamax FC
Crédit : @eltonmokolo (Instagram)

Tout d’abord, comment te vient l’envie de devenir journaliste sportif, et à quel âge ?

L’envie arrive autour de mes 15 ans, à la fin des années collège. Au départ, je me destinais plutôt à être avocat, et puis rapidement je me suis dis que ce ne serait pas forcément la voie idéale pour moi. Au collège, je parlais énormément de sport, et par rapport à ça j’ai décidé d’être journaliste. Cela me permettait de rester dans le sport, ce qui était vraiment l’objectif. Bien évidemment j’aurai aimé être un sportif reconnu, mais à partir du moment où je me suis rendu compte que ce n’était pas possible, je me suis dis que c’était la plus belle alternative. De plus, j’avais quand même de l’aisance à l’écrit et à l’oral, donc c’était un choix cohérent.

Une fois que tu as fait ce choix, vers quelle école tu t’orientes ?
Je me suis orienté vers l’IEJ (Institut Européen du Journalisme). Au lycée, en Terminale, au mois de février, je suis allé sur un salon de l’étudiant. Je suis tombé sur le stand de l’IEJ où l’on m’a expliqué ce qu’est l’IEJ. Sur le coup, ce sont les affiches avec notamment des journalistes très reconnus dessus qui m’ont incité à aller voir ce qu’était cette école. Après, ils m’ont proposé de faire un entretien, avec le directeur adjoint à l’époque. Ça a bien “matché” donc j’ai été faire un concours, que j’ai réussi. C’est ainsi que je suis entré à l’IEJ en 2011.

Dans ces écoles tu as déjà l’opportunité de réaliser des stages dans des rédactions. Qu’est ce qu’on te propose globalement durant ces stages ?
Globalement, dans les rédactions, on a toujours la même idée. À savoir que j’ai fait notamment des stages à l’Info Presse, Eurosport, Goal ou bien RMC Sport. Et dans toutes ces rédactions, l’idée est de retranscrire l’information sous plusieurs formes. Par exemple, à Info Presse (son premier stage), j’ai fait beaucoup d’interviews et dans plusieurs sports : tennis, rugby et football. Je me souviens, à l’époque j’avais interviewé Philippe Montanier. Par contre, à RMC par exemple, j’étais surtout en bureau. Là-bas, je faisais beaucoup de montages pour les émissions de Luis Attaque ou d’After Foot. En fait, à chaque fois ces stages avaient leur spécificité. Et quand je suis arrivé à Goal, j’ai commencé à faire d’avantages d’écrit, ce que signifie que je donnais mon opinion.

Ensuite, comment se passe ton intégration dans le milieu professionnel ?
Ça reste compliqué. Même s’il y a un carnet d’adresses qui s’établit durant mes années à l’IEJ, notamment grâce aux stages, ça reste complexe. Tu es dans les radars, c’est indéniable. Mais, à ce stade, tu es à mi-chemin entre le statut de stagiaire journaliste et le statut de journaliste. Et il est parfois compliqué pour les rédactions de te faire confiance. Alors bien sûr, il y en qui y arrive directement. J’ai des copains de promo qui ont fait la bascule directement, mais moi c’était un chemin un peu plus compliqué. Il faut savoir encore une fois, que le journalisme de sport reste quelque chose de complexe, et il ne faut pas banaliser ça.

Comment est-ce que tu parviens jusqu’au Club des 5 (CD5) ?
Fin 2017, je reçois un appel de Walid Acherchour, cofondateur de la chaîne Youtube. A l’époque, le CD5 était alors en train de se construire et j’ai pensé que c’était quelque chose qui pouvait m’apporter une plus value. Et il se trouve que l’un des rédacteurs en chef du CD5 était un copain de promo pendant 3 ans. C’est donc lui qui a soumis mon nom et Walid m’a ensuite contacté pour me proposer de faire un essai début 2018.

Avant d’arriver là-bas, tu étais vraiment focalisé sur la presse écrite, donc comment est-ce tu vis le passage de l’écrit à la caméra ?
C’est compliqué parce que moi à 15 ans je me destinais à la presse écrite, et il y a encore 6-7 ans, il était impossible pour moi d’aller du côté de la télé ou de la web TV :ce n’était pas mon élément. Mais j’avais cette faculté à être à l’aise à l’oral, ce qui était quand même assez paradoxal. Je me suis alors dis que ce n’était pas pour moi, mais à l’époque je n’avais pas la prétention de tout refuser, donc j’ai accepté la proposition. Ensuite, c’est aller tout naturellement, mais il est vrai que la transition écrite / orale a été un peu compliquée.

On peut voir généralement des débats entre chroniqueurs qui durent plusieurs minutes, comme celui avec Walid ce week-end sur Dortmund par exemple, est-ce que c’est cette liberté que tu es venu chercher dans le digital ?
Oui exactement. Nous, on est en “décélération”, c’est-à-dire que l’on a du temps pour revenir sur les sujets, on a du temps pour aller creuser. Dans la structure de l’émission, on part d’un match, on débriefe ce match, et très rapidement on dévie. On va obligatoirement parler de ce qui entoure les coulisses de ces clubs-là. Avec l’exemple de Dortmund, c’était l’occasion de parler de la politique sportive du club et de son avenir. En fait, on fait beaucoup de digression, notamment pour se projeter.

« On a besoin de locomotives qui tirent la Ligue 1 vers le haut »

Que penses-tu du tirage des 8e de finale de Ligue des Champions pour nos 2 clubs français qualifiés (PSG-Real Madrid et LOSC-Chelsea) ?
C’est 2 tirages compliqués, très compliqués, surtout pour les Lillois. C’est un tirage qui paraît déséquilibré. Dans la mesure où ils terminent premier de leur groupe, mais où ils héritent du champion d’Europe en titre. L’objectif de Lille c’est de faire en sorte que cette confrontation s’équilibre à l’occasion des 2 tours. Mais moi, ça me parait très compliqué pour le LOSC de s’en sortir contre Chelsea. Même si Chelsea présente quelques difficultés en ce moment, il faut contextualiser ceci car ils ont énormément d’absents. Et ensuite pour revenir au PSG, le tirage est bien entendu difficile, mais à partir du moment où ils finissaient deuxième de groupe, ils avaient de grandes chances de tomber sur une grosse équipe. Ils auraient pu tomber sur la Juve qui paraît être le premier de groupe le moins impressionnant. Mais il fallait s’attendre à un gros tirage dans tous les cas.

Comment vis-tu cette première partie de saison de Ligue 1, avec le PSG leader sans être étincelant, avec une lutte derrière pour la 2e place, et avec quelques surprises ?
C’est une première partie de saison intéressante et très enthousiasmante. Alors oui, il y a un “bémol” dans la mesure où le PSG est seul en tête, mais c’était quelque chose d’assez attendu. Ensuite, le championnat est quand même attractif, car il y a beaucoup d’équipes à proposer des choses intéressantes. Mais le second défaut cette année, c’est que certaines équipes sous-performent, et la marge de progression elle est bien là. Parce que l’on est d’accord pour valoriser le championnat de Ligue 1 comme un championnat offensif, qui est un tourné vers l’avant. Mais il faut aussi ne pas se tromper. On a besoin d’avoir des locomotives qui tirent la Ligue 1 vers le haut. Il y a donc le PSG mais il faudrait également Monaco, Lille et Lyon. Et pourtant ces 2 dernières sont en seconde partie de tableau (au moment de l’interview,avant la 19e journée).

Que penses-tu de l’attractivité des championnats européens aujourd’hui, dans le sens où on parle beaucoup de nouvelles générations qui ne sont plus attirées par les matchs dans leur totalité. Trouves-tu que le football d’aujourd’hui attire moins qu’il y a quelques années ?
C’est toujours une question complexe. On est dans une époque où le foot s’est davantage démocratisé. Avant, il était très difficile de regarder les 5 championnats car à l’époque il n’y avait pas les chaînes comme Bein Sports, Amazon Prime, etc … Et cette démocratisation du football permet d’avoir accès à beaucoup de matchs. Aujourd’hui par exemple, un fan de l’Espagnol Barcelone peut regarder tous les matchs de son équipe. Et je ne suis pas sûr que c’était le cas il y a une dizaine d’années. Donc est-ce que le football attire moins ? Je n’en suis pas persuadé. Au contraire, le football génère énormément d’attente.
Par exemple, j’ai mes copains de Winamax qui ont couvert le tirage au sort de la Ligue des Champions, et il y avait 2 000 viewers ! Donc le football continuera d’attirer, parce que le football se démocratise et que l’accès s’élargit. Certes il peut lasser, mais à côté de ça, je ne pense pas qu’il attire moins qu’avant.

Nathan Bigué

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