Montagnes russes : l’Union Saint-Gilloise, ce rêve jaune et bleu

Union Saint-Gilloise Europa League
Crédit : Twitter @UnionStGilloise

Après un exercice 2021-22 exceptionnel, l’Union Saint-Gilloise a remis le couvert cette saison. Les Bruxellois jouent le probable match du titre cet après-midi face au Royal Antwerp. Si on pouvait parler de conte de fées il y a un an, il semble désormais évident que le club ne doit pas ses succès à un simple coup de baguette magique.

« Sweet Caroline ! Â» Ă€ l’interview d’après-match d’une victoire 3-0 face au KRC Genk, le dĂ©fenseur Siebe Van der Heyden se laisse aller sur le cĂ©lèbre tube de Neil Diamond. Son compère Christian Burgess quitte quant Ă  lui les journalistes pour aller boire une bière avec des amis Ă  lui. « Qu’importe si on n’est pas champions, l’important est de faire la fĂŞte ! Â» assurent des habituĂ©s du bar ne marchant plus tout Ă  fait droit. C’est dans cette ambiance familiale, dĂ©calĂ©e et unique en son genre que le public du Parc Duden cĂ©lèbre les succès inarrĂŞtables de leur club, l’Union Saint-Gilloise.

Pour la seconde annĂ©e consĂ©cutive, les Bruxellois jouent des coudes jusqu’au bout pour le titre de champion de Belgique. Un rĂŞve Ă©veillĂ© pour des supporters jaune et bleu ayant connu de 1973 Ă  2021 les sombres divisions infĂ©rieures. Mais derrière les chants lĂ©gers et les chopes ingurgitĂ©es, le club de la capitale a dĂ©jĂ  beaucoup prouvĂ©. Le Petit Poucet d’hier peut d’ores et dĂ©jĂ  ĂŞtre catĂ©gorisĂ© comme l’un des nouveaux poids lourds du football belge.

La crainte d’une gueule de bois

Si l’épopĂ©e des Apaches de la saison dernière avait fait grand bruit, beaucoup s’attendaient Ă  ce qu’il ne s’agisse que d’une fĂŞte sans lendemain. Les rĂŞves de titre s’étaient en effet terminĂ©s sur une commande de pinte jamais arrivĂ©e Ă  table, le Club de Bruges Ă©tant passĂ© en tĂŞte en toute fin d’exercice. Durant l’étĂ©, le club se fait piller bon nombre de ses joueurs stars. Il en va de mĂŞme pour Felice MazzĂą, entraĂ®neur et vĂ©ritable coqueluche du public, parti rejoindre le rival d’Anderlecht. C’est son ancien adjoint, Karel Geraerts, aucune expĂ©rience en tant T1, qui a pris sa place sur le banc. 

Les premières journĂ©es de championnat sont irrĂ©gulières, ne laissant rien prĂ©sager de bon. Le club subit une remontada contre les Rangers en barrage de Ligue des champions et est reversĂ© en Europa League. De toute façon, il semble difficile d’espĂ©rer quoi que ce soit en Europe au vu de l’inexpĂ©rience du noyau. Pire : le fait de jouer tous les trois jours ne risque-t-il pas d’user un effectif limitĂ© ? 

MalgrĂ© les doutes, le Matricule 10 parvient Ă  Ă©lever son niveau de jeu en quelques semaines. En championnat, les Bruxellois remontent rapidement Ă  la seconde place. Les hommes de Karel Geraerts jouent aussi les gros bras les jeudis soir, terminant premiers de leur groupe d’Europa League. En huitièmes de finale, ils Ă©liminent une autre Union, celle de Berlin, avant de s’incliner au tour suivant face au Bayer Leverkusen. En parallèle de tout cela, les Unionistes atteignent les demi-finales de la Coupe nationale, oĂą ils n’échouent qu’aux tirs au but face Ă  l’Antwerp. 

Mercato, choix gagnant et poker money

Pour aboutir Ă  cette success story 2.0, une bonne prĂ©paration en amont Ă©tait nĂ©cessaire. Lors du mercato, des jeunes prometteurs posent leurs valises dans la capitale. Le NigĂ©rian Victor Boniface, recrutĂ© de Norvège pour 2 millions d’euros, impressionne Ă  la pointe de l’attaque et attire dĂ©jĂ  l’attention de grands clubs europĂ©ens. L’ailier gauche Simon Adingra, prĂŞtĂ© cet Ă©tĂ© par Brighton, affiche des statistiques impressionnantes : 14 buts et 13 passes dĂ©cisives toutes compĂ©titions confondues. Et pour compenser la perte de Dante Vanzeir Ă  l’hiver, l’Union caste son remplaçant idĂ©al en la personne de Yorbe Vertessen, prĂŞtĂ© par le PSV Eindhoven.

Le vrai tour de force de la direction est d’avoir fait confiance Ă  Karel Geraerts malgrĂ© les doutes qui l’entouraient. L’ancien T2, dĂ©jĂ  connaisseur du vestiaire, est parvenu Ă  bonifier certains principes de jeu de l’ère MazzĂą. La dĂ©fense Ă  trois est conservĂ©e, mais les longs ballons vers l’avant sont progressivement remplacĂ©s par du jeu de construction. D’un point de vue physique, les Unionistes marchent sur les autres formations belges en pratiquant un jeu intense et Ă©reintant. Karel Geraerts a amĂ©liorĂ© un effectif dĂ©jĂ  bien huilĂ© en parvenant Ă  tirer le maximum de chaque cadre, mĂŞme ceux ne dĂ©bordant pas de talent au premier abord. La marque des grands coachs, assurĂ©ment.

Crédit : RTBF

Les plus cyniques ne manqueront pas de souligner que tout ce bon travail coĂŻncide avec l’arrivĂ©e des livres sterling de Tony Bloom. Ce richissime homme d’affaires et joueur de poker britannique possède aussi Brighton en Premier League. Une hausse de moyens considĂ©rable ayant permis Ă  l’Union de se stabiliser financièrement et de se structurer en un club sĂ©rieux. Un projet de nouveau stade est Ă  l’étude, de l’argent est investi en suffisance dans les transferts et des joueurs sont Ă©changĂ©s intelligemment avec les Seagulls. Une relation qui semble bien loin de certaines gestions satellites folkloriques que connaissent d’autres clubs belges.

Un match pour le titre

Si l’Union a probablement fait encore mieux que la saison précédente, cela ne sera peut-être pas suffisant. Alors qu’il ne reste que deux journées de Play-offs à disputer, les Bruxellois sont seconds derrière l’Antwerp, leader avec le même nombre de points. Dimanche, les deux formations s’affrontent à Anvers pour ce qui sera certainement le match du titre. Une rencontre qui s’annonce ardue pour les hommes de Karel Geraerts tant leurs adversaires sont impressionnants ces dernières semaines.

Union Saint-Gilloise supporters
Crédit : Twitter @UnionStGilloise

Il suffit toutefois de tendre l’oreille au Parc Duden pour comprendre qu’une nouvelle seconde place ne sera pas vĂ©cue comme un affront. « L’Union n’a pas pas besoin d’ĂŞtre champion(ne), pour s’enfiler des litres de houblon ! Â» LĂ  aussi s’explique le succès de l’équipe : un public passionnĂ©, bon enfant, permettant aux joueurs de se transcender pour un titre qui aurait paru surrĂ©aliste il y a peu. 

En fin de saison, les supporters jaune et bleu se réuniront quoi qu’il arrive au bar du stade. Dans une main, un mouchoir pour essuyer des larmes de joie ou de peine. Dans l’autre, une bonne bière à déguster entre amis. Celle-là au moins, les Unionistes sont d’ores et déjà assurés de la lever au ciel…

François Linden

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