Très connu outre-Rhin, Hans-Joachim Watzke l’est beaucoup moins en France. Le directeur général du Borussia Dortmund possède de nombreuses casquettes dans les instances du football allemand et européen. De quoi en faire un personnage clé dans le paysage du ballon rond chez nos voisins germaniques.

Une page va se tourner dans l’un des plus grands clubs d’Allemagne et d’Europe. Le directeur exécutif du Borussia Dortmund a annoncé qu’il quitterait les Schwarzgelben au terme de son contrat, fin d’année 2025. Après 19 années de bons et loyaux services, Hans-Joachim Watzke, parfois surnommé « l’homme le plus puissant du football allemand », quittera prochainement l’un de ses nombreux postes en lien avec le ballon rond. Mais alors, qui est-il réellement ?
Bercé dans les affaires dès le plus jeune âge
Né le 21 juin 1959 à Marsberg, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie (Land allemand), Hans-Joachim Watzke a grandi à proximité de Dortmund, où il a vécu durant la majeure partie de sa vie. Son père, Hans Watzke, était un homme politique allemand qui a notamment été au parlement allemand durant de nombreuses années (1975-1990).
Le fils Watzke a donc toujours été connecté de près ou de loin avec le monde des affaires. Et c’est dans le but de s’en rapprocher davantage qu’il se lance dans des études d’administration des affaires en 1978. Il ressort avec son diplôme quelques années plus tard et enchaîne plusieurs emplois avant de fonder, à 30 ans, sa première entreprise : Watex Schutz-Beartikel GmbH. Une fabrique de vêtements de travail et d’uniformes de pompiers, actuellement gérée par sa femme, Anette Watzke.
Il s’attache assez rapidement au Borussia Dortmund. Dès 1996, il prend sa première Mitgliedausweis (carte de membre du BVB), puis en 2001, il rejoint la partie administrative du club en devenant son trésorier. Un poste qu’il va occuper jusqu’en 2005, une année tournante dans sa vie et sa carrière. Le 15 février de cette année, il est justement nommé directeur général du club de Bundesliga. Cela conditionnera son départ du poste de trésorier, confié à Reinhold Lunow.
Aujourd’hui encore, l’homme d’affaires allemand est DG du BVB. Son contrat court jusqu’au 31 décembre 2025, date à partir de laquelle les Borussen devront trouver son successeur. En effet, du haut de ses 65 ans, Hans-Joachim Watzke a décidé de ne pas continuer cette aventure longue d’une vingtaine d’années au club allemand. La fin d’une ère.
🚨 Le patron du BVB, Hans-Joachim Watzke, quittera Dortmund à l’automne 2025 ! #BVB #Watzke
— Unser Fußball (@unserfussball) January 8, 2024
Présents au club depuis 2001, il a permis de remettre sur pied financièrement le club !
Un grand monsieur qui va s’en aller👏 pic.twitter.com/nImRnlZJOR
L’un des sauveurs du Borussia Dortmund
Lorsqu’il arrive à la tête du BVB en 2005, la situation est plus que délicate pour les Allemands, tant sportivement que financièrement. Pour rappel, le club de la Ruhr a la particularité assez rare d’être coté en bourse. La chute des actions est vraiment représentative de la crise que rencontre le Borussia. Après deux saisons mitigées (6e puis 7e), le prix des actions chute de 80 % passant de 11 € à 2,5 €. Leur dette est estimée à l’époque à 120 M€, une somme qui peut en faire sourire certains.
Lors de la saison 2006-2007, les Jaune et Noir sont passés proche de connaître un destin tragique. Leur licence de club professionnel a bien failli leur être retirée, ce qui aurait envoyé le club en troisième division, pas totalement professionnalisée à l’époque.

La sortie de cette situation délicate se fera en partie grâce à Hans-Joachim Watzke et les créanciers du Borussia Dortmund. Ils lancent un plan d’assainissement du club, qui redistribue complètement les cartes. Le stade est vendu à hauteur de 75 % – puis racheté en partie l’année suivante – et le club cumule plusieurs prêts. Notamment un à son rival sportif, le Bayern Munich, qui l’aide à sortir la tête de l’eau. Même s’il faut rappeler que ce prêt de 2M€ ne représente que 1% de la dette totale contractée.
Ces restrictions budgétaires se couplent à de très bons coups sportifs. Jürgen Klopp arrive de Mayence, la formation du BVB sort plusieurs marsupiaux au talent exceptionnel (Nuri Şahin, Mario Götze, Marcel Schmelzer…) et sur le marché des transferts, les bonnes affaires s’enchaînent avec les arrivées de Mats Hummels ou Shinji Kagawa. Mais si le BVB s’est sauvé d’un destin bien plus funeste, c’est en partie grâce à l’arrivée d’Hans-Joachim Watzke et la mise en place du plan d’assainissement.
Un homme multitâche
Comme cité en introduction, Watzke est considéré par beaucoup comme l’homme le plus puissant du football allemand. Des éloges qui ne sont pas le fruit du hasard. Il est en effet présent dans de nombreuses instances qui régissent le football en Allemagne, mais aussi en Europe. Certains décrivent le natif de Marsberg comme quelqu’un qui aime être au centre de l’attention. Par exemple, outre-Rhin, le média NZZ se demande « dans quelle mesure Hans-Joachim Watzke se sent à l’aise au centre de l’attention publique ».
À lire aussi – Hambourg SV, le dinosaure d’Allemagne qui peine à remonter
[ARTICLE 📝] Enlisé au deuxième échelon du football allemand depuis 2018, le Hambourg SV est passé proche de son retour au premier plan, à de nombreuses reprises. En vain, pour l’instant. Article ! 🇩🇪📉
— Toile du Footeux (@toiledufooteux) December 16, 2023
✍️ @DorianMarchiset https://t.co/TpLyvo97eQ
En plus d’être le directeur général et d’avoir la mainmise sur le Borussia Dortmund depuis 19 ans, Aki Watzke a aussi son mot à dire en Bundesliga. Il occupe les postes de président du conseil de surveillance et porte-parole de la Ligue allemande de football (DFL), mais également celui de premier vice-président de la Fédération allemande de football (DFB). Chez nos voisins germaniques, il s’est illustré en participant activement et en militant pour l’une des règles fondamentales du football allemand : le 50+1.
Cette règle, introduite en 1998, stipule que les membres de chaque club de première et deuxième divisions doivent toujours conserver la majorité des votes lors de l’assemblée générale. Concrètement, cela empêche tout investisseur privé de posséder plus de 49 % des parts d’un club. Exception faite si l’investisseur est présent au club depuis plus de 20 ans.
En 2018, certains clubs remettent alors cette règle en question. À l’image du RB Leipzig ou du TSG Hoffenheim, qui veulent s’ouvrir aux investisseurs étrangers. La crainte étant que la Bundesliga et ses équipes prennent un temps de retard sur les autres championnats européens. Malgré des mouvements de contestation, Hans-Joachim Watzke maintient son propos et appel au vote. Celui-ci tourne largement en son avantage et 33 des 36 clubs concernés votent en faveur du maintien du 50+1, en 2009. Un nouveau vote a lieu en 2018, Watzke soutient de nouveau cette règle qui est encore une fois conservée.
Plus qu’un dirigeant, un homme engagé…

Vous l’avez compris, si Aki a une idée en tête, courageux est celui qui veut lui faire changer d’avis. Comme le prouve cette histoire du 50+1. Mais ce n’est pas le seul exemple qui montre la détermination mentale du sexagenaire. L’un des combats où il s’engage le plus reste tout de même la lutte contre les investissements monstres des multinationales (ou autres) envers les clubs.
En Allemagne par exemple, il n’hésite pas à s’attaquer au RB Leipzig, repris en cinquième division par Red Bull. Une fois dans l’élite, les Allemands ont dû se conformer à la règle du 50+1, mais reste souvent accusé de corrompre son esprit avec une cotisation de 1 000€ contre 62€ à Dortmund par exemple.
Ce combat ne s’arrête pas aux frontières germaniques. Cette saison, Watzke a fait polémique, ou plutôt l’une de ses déclarations. « Nous ne jouons plus contre des équipes, mais contre des pays, comme le Qatar ou l’Arabie Saoudite », s’insurgeait-il avant l’entrée en lice en la Ligue des Champions cette saison. Faisant ainsi référence au PSG et à Newcastle, tous deux détenus par des fonds d’investissements étrangers.
… à tous les niveaux
Même s’il se bat pour la préservation d’un football traditionnel à l’échelle nationale et internationale pour les clubs professionnels, Hans-Joachim Watzke est tout aussi impliqué avec les équipes de jeunes. En 2002, la DFB lance un programme visant essentiellement à offrir aux enfants davantage d’expériences de réussite. Les experts estiment que cette réforme constitue un élément important pour résoudre les problèmes sportifs dont souffre le football allemand.

Actuellement, les jeunes allemands licenciés jouent un match par week-end, mais cela changera dès l’année prochaine, lors de la saison 2024-25. Désormais, les jeunes joueront en équipes de deux ou trois. Celui qui gagne monte d’un terrain de jeu, celui qui perd descend. Le but est de leur permettre d’avoir plus souvent le ballon et de ne pas laisser deux ou trois individualités porter une équipe à bout-de-bras.
Cette réforme n’a visiblement pas plu à Watzke, qui s’est empressé de faire plusieurs déclarations dans la presse. « Bientôt, nous jouerons sans ballon, ou bien, nous le rendrons carré pour qu’il ne s’échappe pas des jeunes un peu plus lents. Je pense que c’est fondamentalement une mauvaise approche », a ironisé le directeur général du BVB. Il a également indiqué que les matchs sur des terrains plus grands, avec des scores parfois fleuves, peuvent forger le mental des jeunes joueurs : « Si vous, à six, huit ou neuf ans, n’avez jamais le sentiment de perdre, alors vous ne trouverez jamais la grande force de gagner ».
Des derniers mois plus compliqués
Depuis son arrivée au poste de directeur général il y a 19 ans, Hans-Joachim Watzke a connu des phases de bon et de moins bon. Tant sur les résultats de son club que sur l’avis des supporters à son égard. Et on ne peut pas dire que les derniers mois tournent réellement en faveur du dirigeant allemand.
Parmi les choix qui divisent, son souhait de maintenir Edin Terzić au poste d’entraîneur, malgré les nombreuses critiques à l’encontre du coach germano-croate. Pourtant, les Jaune et Noir ont terminé à la première place de leur groupe en Ligue des Champions. En Bundesliga, le constat est néanmoins plus contrasté. Après l’échec monumental lors de la saison précédente, le Borussia peine à se remettre dans le bain (5e). Dans le jeu, ce n’est pas plus convaincant : aussi bien offensivement que défensivement, voire même en transition… S’il est loin de convaincre tout le monde, Edin Terzić semble au moins convaincre Hans-Joachim Watzke.
Le recrutement du Borussia Dortmund est également dépendant de son directeur général. Et pour le moment, les achats de cet été ne portent pas leurs fruits. Par exemple, Félix Nmecha est recruté pour environ 30 M€ afin de prendre le relais de Jude Bellingham. Mais la sauce ne prend pas et l’Allemand peine à se faire une place de titulaire. De quoi remettre en question la stratégie de recrutement d’Aki.
La fin d’une aventure
« J’ai le sentiment que j’en suis arrivé au point où je dis : à un moment donné, cela suffit. Il était important pour moi de pouvoir annoncer une sortie volontaire de ce poste. Je suis très reconnaissant envers mon club de m’avoir donné cette opportunité au fil des années », s’est-il récemment exprimé dans un communiqué du club. Une sacrée page se tournera alors le 31 décembre 2025 : Hans-Joachim Watzke ne sera plus le directeur général du BVB.
Il a vécu des moments forts du club, comme la survie face à la faillite à son arrivée ou l’exceptionnelle finale de Ligue des Champions 2013, dans un Klassiker face au Bayern Munich. Il aura également assisté au passage de joueurs incroyables tels que Robert Lewandowski, Ilkay Gündoğan ou plus récemment Erling Haaland. En bref, celui qui se fait l’homme le plus puissant du football allemand a donc un sacré bagage et des convictions fortes qu’il n’hésite pas à défendre. Et si le voir dans les bureaux du Borussia Dortmund ne sera bientôt plus possible, il gardera bien évidemment un pouvoir indéniable sur le foot allemand et européen.
[…] À lire aussi – Qui est Hans-Joachim Watzke, l’homme le plus puissant du football allemand ? […]
[…] À lire aussi – Qui est Hans-Joachim Watzke, l’homme le plus puissant du football allemand ? […]